Alassane Ouattara

“Faire accoucher la vérité par la seule force du dialogue”: la Commission dialogue, vérité et réconciliation débute son travail en Côte d’Ivoire

Lors d’une cérémonie sobre à la fondation pour la recherche de la paix, établie par l’ancien président ivoirien Félix Houphouët-Boigny à Yamoussokro, la capitale politique de la Côte d’Ivoire, Alassane Ouattara a intronisé la nouvelle commission pour le dialogue, la vérité et la réconciliation, dont le mandat est de “panser les plaies” de la population ivoirienne, pour que le pays puisse avancer sereinement et en paix.

La nouvelle commission travaillera pendant deux ans. Selon son président, l’ancien Premier Ministre Charles Konan Banny, «Notre commission doit accoucher de la vérité en favorisant un dialogue franc, sincère, inclusif, équilibré… » Bien que la commission n’ait pas le pouvoir d’amnistie, celle-ci pourra faciliter la mise en oeuvre d’un processus qui permettra de dédommager les victimes, ainsi que des mécanismes de règlement des conflits qui s’appuieront à la fois sur le système de justice national et les outils locaux traditionels.

Il est intéressant de noter que Charles Konan Banny (CKB) n’est pas l’allié politique naturel d’Alassane Ouattara, puisque celui-ci a été premier ministre sous Laurent Gbgabo. Néanmoins, comme le souligne la presse ivoirienne, il représente bien le metissage et la diversité de la population ivoirienne. Provenant d’une région centrale, avec des parents de différentes ethnies et un mariage inter-ethnique, CKB est un bon choix – politique et stratégique – pour la présidence de la commission.

Pour Alassane Ouattara, la Commission doit etre perçue comme une sorte de “thérapie nationale”, et il a exhorté tous les Ivoiriens et Ivoiriennes a y participer pleinement. Depuis qu’il est arrivé au pouvoir au mois de mai, Ouattara a fait de la justice et de la réconciliation nationale des priorités. Outre la création de cette nouvelle commission, le nouveau président a déjà relancer les mécanismes de justice – nationale et internationale – ce qui est absolument primordial afin d’assoir la légitimite de sa présidence. Il y aura certainement des moments difficiles, tant au travers des mécanismes de justice que ceux de la commission, lorsque des crimes commis par des alliés proches de Ouattara seront révélés, mais c’est le prix à payer pour unifier le pays.

Malgre un soutien apparemment généralisé pour la mise en place de cette commission, il reste que le président de l’Assemblée Nationale, Mamadou Koulibaly, un politicien historiquement loyal au parti de Gbagbo, pense que la paix passe avant tout par une reconciliation (publique) et politique entre Alassane Ouattara, Laurent Gbagbo et Henri Konan Bédié (qui fut président avant Gbagbo). Ouattara, pour sa part, a rappeller que le mandat du Sénat a expiré en 2005, et a annoncé les élections législatives pour le 11 décembre. Reste à voir si les autres partis politiques – notamment celui de Gbagbo – y participeront. Sans la participation de tous les partis politiques majeurs, les élections risquent d’être considérées comme injustes, ce qui pourrait déstabiliser Ouattara.

Aujourd’hui, néanmoins, il semble que Ouattara a mis en place les éléments cles pour créer une fondation stable pour le pays: la réforme de l’armée et de la police, la mise en place de processus juridiques nationaux et internationaux pour punir les crimes commis de part et d’autre pendant la crise, la nouvelle commission, ainsi qu’un travail de fond pour obtenir la confiance et le soutien de la communauté internationale.